mardi 10 novembre 2020

Putophobes

Article sympa de Reines des Temps Modernes


Bertoulle Beaurebec – “La putophobie, la misogynie et le slut-shaming sont des comportement de plus en plus normalisés”


 


 

Notre QUEENSPIRATION de la semaine s’appelle est multipotentielle. Elle s’appelle Bertoulle Beaurebec. Elle est artiste-performeuse d’art corporel rituel, travailleuse du sexe dans la pornographie, afroféministe et autrice. En octobre dernier, elle nous livrait le puissant ouvrage Balance ton Corps, manifeste pour le droit des femmes à disposer de leur corps. 

 

RTM | Bonjour Bertoulle, nous sommes ravies de t’accueillir sur RTM. Quels sont les mots que tu choisirais pour t’introduire à nos lectrices et lecteurs ?

Bertoulle | Je suis Bertoulle Beaurebec, je suis une femme queer afropéenne et afroféministe pro-choix âgée de 24 ans. Je suis artiste-performeuse d’art corporel rituel (mes disciplines de prédilections sont l’avaler de sabre, les rituels de résistance à la douleur). Mes objectifs, au travers de cet art, sont d’inspirer et d’atteindre des états modifiés de conscience. Je suis également travailleuse du sexe dans la pornographie (et j’ai auparavant été effeuilleuse érotique, dominatrice BDSM, strip-teaseuse, sugar-babe et escort). Et enfin je suis autrice. Mon premier ouvrage Balance ton Corps, manifeste pour le droit des femmes à disposer de leur corps a paru aux éditions la Musardine le 1er octobre de cet année.

RTM | Plus jeune, quel rapport entretenais-tu avec ton corps ?

Bertoulle | Je pense que comme beaucoup, lorsque j’étais adolescente, j’ai eu une relation ingrate et conflictuelle avec mon corps pour diverses raisons. Le regard que la société dans laquelle nous évoluons porte sur nos corps est essentiellement emprunt de jugements et d’injonctions contradictioires qui sont encore plus difficile à questionner lorsqu’on est jeune. Pour autant, même si certaines parties de mon corps me complexaient, je n’ai jamais été pudique, ni ressenti de honte vis-à-vis de ma pilosité, par exemple.

RTM | Quand prends-tu conscience que ton corps est tien et qu’il n’appartient qu’à toi de décider ce que tu en feras ?

Bertoulle | Je l’ai toujours sû. Bien évidemment, il m’a fallu attendre un certain âge, mon indépendance et l’assimilation de certaines expériences pour agir en conséquence.

RTM | Dans tes performances, tu n’hésites pas à repousser les limites de ton corps. Quel est ton rapport au risque ?

Bertoulle | Très serein.

RTM | Beaucoup pensent que féminisme et prostitution ne sont pas compatibles. Selon toi, le féminisme peut-il se penser sans intégrer les vécues, les paroles et les luttes des travailleuses du sexe ?

Bertoulle | Non, il ne le peut pas. Les travailleuses du sexe sont des femmes et des personnes sexisées : iels ont toujours participé aux combats féministes et aux luttes contre les discriminations de genre, sexistes et racistes. Pour autant, iels ont toujours été agressées, discriminées, tuées, raillées dans l’indiférence générale. Si une catégorie de la population à la connaissance nécessaire pour développer des stratégies de survie et penser un monde plus égalitaire face à l’hétéropatriarcat capitaliste, ce sont les putes ! Accorder la valeur que méritent leurs existences, leurs paroles, leur vécus et leurs pensées politiques est primordial afin de faire avancer la cause des personnes sexisées et discriminées. Il me semble que c’est l’objectif du féminisme. En tout cas, celui auquel j’adhère est pro-choix: par conséquent il n’a aucun critère moral pudibond postchrétien pour considérer une personne sexisée comme étant défendable ou non. Qu’iel décide d’exercer son droit àobtenir une IVG, qu’iel porte le voile ou qu’iel soit travailleuse du sexe.

RTM | Qu’est-ce qu’être une femme noire dans l’industrie pornographique ?

Bertoulle | C’est être une femme noire dans le milieu du travail au sein d’une société postcoloniale et sexiste. Avec les mêmes stéréotypes sexuels qu’on appose aux femmes noires dans les sphères sexuelles et amoureuses intimes. La misogynoir n’épargne aucun travail.

RTM | Quels sont les plus gros clichés qu’on associe aux actrices pornos et aux travailleuses du sexe selon toi ?

Bertoulle | Leur supposée absence de capacité de réflexion, leur supposée superficialité, leur supposée incapacité à nouer des relations intimes et amoureuses profondes, leur supposée inaptitude à prendre soin et éduquer des enfants, par exemple.

RTM | Comment définirais-tu le BDSM ?

Bertoulle | BDSM est un acronyme pour Bondage et Discipline/ Domination et Soumission/ Sado-masochisme. Il s’agit de diverses pratiques érotiques et/ou sexuelles qui découlent d’une érotisation de la douleur et des rapports de pouvoir entre des partenaires de jeu consentant.e.s et adhérant.es à un certain nombre de règles plus ou moins communes aux adeptes.  

RTM | Le BDSM peut-il est une pratique de réappropriation du corps ?  

Bertoulle | Je pense que pour une pratique saine du BSDM, il faut nécessairement être à un endroit d’écoute et de compréhension de son corps afin de ne pas se mettre en danger (ou mettre en danger ses partenaires de jeu). Mais d’autres personnes concernées pourraient avoir un avis différent.

RTM | Quels conseils donneraient-tu aux femmes qui souhaitent se réapproprier leur corps ?

Bertoulle | Faire taire le bruit sociétal ambiant et apprendre à s’écouter. Puis agir en conséquence de ce qu’il nous faut.

RTM | Tu viens de sortir un ouvrage « Balance ton corps », un manifeste pour le droit des femmes à disposer de leur corps. Comment est née l’idée de cet ouvrage ?

Bertoulle | L’écrire s’est imposé à moi comme une nécessité en constatant que la putophobie, la misogynie et le slut-shaming étaient des comportement de plus en plus normalisés.

https://www.instagram.com/p/CFSKjd_A6eP/

RTM | A qui s’adresse ce livre ?

Bertoulle | À tout le monde !

RTM | En quoi ton vécu et tes expériences ont-ils nourrit ton afroféminisme ?

Bertoulle | Je dirais que mon afroféminisme a nourri mon aptitude à cristalliser  mes expériences et contribué àma capacité politiser les actions de ma vie personnelle pour contribuer -à mon niveau- à faire de notre sociétéun monde plus bienveillant et juste.

RTM | Il y a une citation que l’on te doit que je trouve magique : “Etre une salope éclairée est politique, être une salope spirituelle est révolutionnaire ». Qu’est-ce qu’être une salope spirituelle ?

Bertoulle | C’est être une femme libre sexuellement tout en étant spirituelle .

RTM | Quand on fait exploser le cadre des normes, comment se sent-on vis à vis d’une société si brimée ?  

Bertoulle | Libre et chanceuse.

RTM | Quel est ton idéal de vie en société ?

Bertoulle | Vivre au sein d’une société bienveillante où l’altérité serait célébrée, le capitalisme aboli et la nature respectée me semblerait idéal.

RTM | J’ai lu que tu écoutais du métal. Aurais-tu 3 artistes métalleux noir.es à nous conseiller ?

Bertoulle | Ah! Manuel Gagneux et son projet Zeal and Ardor, Tosin Abasi et son groupe Animal as Leader. Ice-T et son groupe Body Count. Si des personnes connaissent des groupes de metal (pas de rock hein!, avec des musiciennes afrodescendantes, qu’iels me DM sur instagram!

RTM | Et enfin qu’est-ce qui fait de Bertoulle une Reine Des Temps Modernes ?

Ma multipotentialité.





 

Source : https://reinesdestempsmodernes.com/rtm-world/queenspiration/2020/11/bertoulle-beaurebec-la-putophobie-la-misogynie-et-le-slut-shaming-sont-des-comportement-de-plus-en-plus-normalises/

 



 

 

 

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